Plagiocephalie positionnelle

Plagiocephalie positionnelle

Déformation positionnelle

La déformation positionnelle, est un signe clinique rhumatologique bénin se traduisant par une asymétrie plus ou moins importante de la boîte crânienne. Développée in utero ou au cours des premiers mois de la vie, la déformation positionnelle non traitée chez le nouveau-né peut rester intacte à l’âge adulte ou se réduire par correction spontanée de la statique cervicale (aspects posturologiques).

Sommaire

Diagnostic

Le diagnostic est clinique, l’asymétrie crânienne est facilement décelable. A la naissance, elle motive un examen radiologique pour s’assurer qu’elle n’est pas d’origine synostosique.

Étiologie

La croissance crânienne chez le nouveau-né est régie par des facteurs génétiques et organiques d’une part et des facteurs mécaniques d’autre part. La déformation positionnelle résulte d’une perturbation de ce dernier facteur : la mécanomorphose, c'est-à-dire la partie de la croissance réalisée par les contraintes mécaniques, se réalise anormalement.

On peut individualiser trois grands types de déformation positionnelle[1], dont la physiopathologie mécanique diffère :

  • Plagiocéphalie fronto-occipitale (du grec "plagio" : oblique et "kephalê" : tête)

L’aspect du crâne décrit un aplatissement frontal (partie avant du crâne) unilatéral et une protrusion occipitale (partie arrière du crâne) du même côté. Ce type de déformation positionnelle est très souvent associé à un torticolis congénital, c’est-à-dire un raccourcissement d’un des deux muscles sterno-cléido-mastoïdiens, qui par son action mécanique, tend à « tirer » un hémi-crâne vers l’arrière. Ce raccourcissement du muscle a lieu le plus souvent in utero : la position en flexion prolongée de la tête du fœtus pourrait être à l’origine d’une hypoxie de la loge musculaire et donc de sa rétraction fibreuse.

  • Plagiocéphalie occipitale

L’aspect du crâne décrit un aplatissement occipital (partie arrière du crâne) unilatéral. Ce type de déformation positionnelle est plus souvent lié à un spasme musculaire actif des muscles sous-occipitaux associé ou non à un spasme du muscle sterno-cléido-mastoïdien. L’origine de ce réflexe musculaire est essentiellement liée aux contraintes traumatiques ou micro-traumatiques appliquées sur la tête et le rachis cervical du nouveau-né, notamment lors de l’extraction natale, où ces structures peuvent subir des contraintes importantes : rotations, utilisation d’outils obstétricaux (ventouse, forceps)…[2] Ce spasme musculaire aboutit, comme chez l’adulte atteint d’un torticolis, à une position « préférentielle » : le nouveau-né aura tendance à garder sa tête d’un même côté. Cette caractéristique ne permet pas au crâne encore malléable du nouveau-né de croître dans des conditions normales et donne lieu à un aplatissement arrière unilatéral sous l’effet d’une compression prolongée.

  • Brachycéphalie postérieure, ou Platycéphalie (du grec "brakhus" : court ou "platy" : large et plat)

L’aspect du crâne décrit un aplatissement occipital (partie arrière du crâne) bilatéral plus ou moins symétrique. Il existe deux origines possibles pour ce type de déformation. La première ressemble à celle de la plagiocéphalie occipitale, c’est-à-dire un spasme musculaire actif des muscles sous-occipitaux qui empêche le nouveau-né de tourner la tête, d’un côté ou de l’autre. La seconde est au contraire due à une inhibition psychomotrice : le nouveau-né tourne "naturellement" peu la tête. La compression prolongée sur l'arrière du crâne qui en résulte donne lieu à un aplatissement plus ou moins symétrique. Le traitement ne sera pas le même selon l'origine du trouble.


Déformationspositionnelles.jpg


Le taux d’incidence des déformations positionnelles est légèrement supérieur chez les sujets masculins[1] et chez les jumeaux[3]. Un accouchement difficile est également un facteur favorisant une déformation positionnelle[3] (puisqu'il est lié à des contraintes mécaniques).

Depuis 1992, il est conseillé aux parents de coucher leurs enfants sur le dos. Cette mesure a permis de réduire considérablement les risques de mort subite du nourrisson, mais elle s’est accompagnée d’une augmentation très importante des déformations positionnelles[4], puisqu'elle favorise la compression postérieure. Il n'est cependant pas conseillé de faire dormir sur le ventre les enfants présentant une déformation positionnelle : cette dernière est bénigne et peut se corriger, contrairement à la mort subite du nourrisson.

Traitement

Après environ 18 mois, la déformation est installée de manière irréversible ou presque (les sutures entre les os du crâne se sont « soudées »). La chevelure aura cependant tendance à cacher le désagrément esthétique qui ne se verra généralement pas à l’âge adulte.

Le traitement des déformations positionnelles diffère selon l’origine mécanique du trouble :

  • S’il y a une position préférentielle, on peut appliquer des mesures quotidiennes de bon sens : solliciter la tête du nourrisson passivement (sans tourner soi-même sa tête, au risque de lui faire mal), en aménageant le berceau de manière à attiser la curiosité du côté opposé au côté préférentiel : mobile, musique, personnes, lumière...
  • Traitement ostéopathique : la manipulation par un praticien formé en périnatalité est le traitement de choix. L’ostéopathe, en agissant notamment sur la raideur pathologique du rachis cervical, rétablit les conditions nécessaires à une croissance physiologique. En trois à quatre séances étalées sur un ou deux mois, le crâne retrouve progressivement sa symétrie. Plus tôt le nourrisson est pris en charge, plus le résultat est efficient. Au-delà de 6 mois la correction est difficile, au-delà de 12 mois elle n’est presque plus effective.
  • La kinésithérapie est particulièrement indiquée pour le traitement du torticolis congénital (rétraction fibreuse du muscle sterno-cléido-mastoïdien).
  • La chirurgie du muscle sterno-cléido-mastoïdien peut être indiquée en cas d’échec du traitement ostéopathique et kinésithérapique sur ce muscle. Sauf quelques cas extrêmes, une intervention chirurgicale n’est pas indiquée pour la déformation positionnelle en elle-même compte tenu de la bénignité du trouble.
  • Autres traitements : Un traitement orthopédique (très répandu outre-atlantique) avec port d'une orthèse crânienne (casque semi-rigide) permet de remodeler la tête de l'enfant en quelques mois[5].

Aspects culturels

Culture pré-inca - Crâne déformé pour des raisons esthétiques et sociales.
Crânedéforméméthode.jpg

Des cultures andines précolombiennes déformaient volontairement, pour des raisons esthétiques, sociales ou religieuses, le crâne des nourrissons avec des bandages ou des morceaux de bois fixés afin d’augmenter la hauteur au sommet du crâne.[6]

En France, une tradition encore répandue au début XIXème siècle qui consistait à coiffer les nourrissons d’un bandeau serré, était souvent à l’origine d’une déformation crânienne non souhaitée. Le docteur Achille Foville dénonça violemment cette pratique en 1834 dans un mémoire[7], à une époque où l'on pensait que ce type de déformation pouvait avoir des répercussions sur l'intelligence future des enfants.




Bibliographie

  • Roselyne Lalauze-Pol - "Le crâne du nouveau-né", 2004, ed. Sauramps Médical. (ISBN 978-2840233374)
  • Nicette Sergueef - "Ostéopathie Pédiatrique", 2007, Elsevier Masson, France. (ISBN 2842999177 et ISBN 978-2842999179)

Notes et références

  1. a  et b G. Captier, N. Leboucq, M. Bigorre, P. Montoya - « Relation entre la déformation crânienne et les anomalies musculaires cervicales dans les plagiocéphalies positionnelles » - Elsevier, 2005
  2. Sergueef N, Nelson KE, Glonek T. - "Palpatory diagnosis of plagiocephaly"
  3. a  et b G. Captier, N. Leboucq, M. Bigorre, F. Canovas, F. Bonnel, A. Bonnafé, P. Montoya - « Etude clinico-radiologique des déformations du crâne dans les plagiocéphalies sans synostose » - Elsevier, 2003
  4. American Academy of Pediatrics Task Force on Sudden Infant Death Syndrome - Pediatrics. 2005 Nov;116(5):1245-55. Epub 2005 Oct 10.
  5. Hôpital Neurologique de Lyon, Service du Professeur Mottolese.
  6. F.J. Carod Artal, C.B. Vázquez Cabrera - Neurological paleopathology in the pre-Columbian cultures of the coast and the Andean plateau, artificial cranial deformation, Revista de Neurologia, 2004 Apr 16-30;38(8):791-7
  7. Achille Foville - « Influence des vêtemens sur nos organes – Déformation du crâne résultant de la méthode la plus générale de couvrir les enfans ».

Voir aussi

Liens externes

  • [1] - Site du Craniofacial Group (fr)
  • Portail de la médecine Portail de la médecine
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