Coup de jarnac

Coup de jarnac

Coup de Jarnac

L'expression coup de Jarnac se dit en référence à un coup violent, imprévu et considéré, à tort, comme déloyal ou pernicieux. Dans son sens premier et d’escrime, il s’agit d’un coup à l’arrière du genou ou de la cuisse. À l’époque où il devint célèbre, le coup était imprévu et c’est ce qui lui a donné sa signification.

L’expression devint bientôt synonyme d’habileté. Cependant, elle prit à partir du Dictionnaire de Trévoux (fin du XVIIIe siècle) un sens péjoratif qu’elle a encore parfois aujourd’hui. Émile Littré rétablit l'acception d’origine, un coup habile et fort loyal :

« Gui de Chabot Jarnac, dans un duel, le 10 juillet 1547, fendit d’un revers de son épée le jarret à son adversaire François de Vivonne, seigneur de La Châtaigneraie. Ce coup fut trouvé très habile et fournit une expression proverbiale, qui a pris un sens odieux ; mais c’est un tort de l’usage, car le coup de Jarnac n’eut rien que de loyal, et le duel se passa dans toutes les règles de l’honneur. À la suite de cela, un jarnac s’est dit aussi pour un poignard. »

Sommaire

Détail de l’affaire

Guy Chabot de Saint-Gelais, futur deuxième baron de Jarnac, s’était marié en mars 1540 à Louise de Pisseleu, sœur de la duchesse d’Étampes, maîtresse de Francois Ier. Le dauphin, le futur Henri II, avait fait courir le bruit, à l’instigation sans doute de sa maîtresse Diane de Poitiers, que Chabot devait à sa belle-mère, Magdelaine de Puyguyon, seconde épouse de son père, le baron Charles Chabot, des faveurs de toutes sortes.

La duchesse d’Étampes, outragée, demanda à son royal amant justice de ces bruits calomnieux, et Francois Ier ne put qu’accéder à sa demande. Le coupable, le dauphin, craignait la colère de son père, et ce fut La Châtaigneraie, ami du dauphin et redoutable bretteur, qui se dévoua pour dire que c’était lui l’auteur de ces bruits, et qu’il n’avait d’ailleurs fait que répéter ce que Guy Chabot lui avait dit.

Chabot ne put, à son tour, que demander au roi la permission de venger son honneur, mais Francois Ier la refusa toute sa vie, bien conscient qu’il ne s’agissait là que de « querelles de femmes jalouses ».

En 1547, à l’avènement d'Henri II, Chabot renouvela sa demande, qui fut alors accueillie favorablement. Mais la réputation de La Châtaigneraie en tant qu’escrimeur était telle que Chabot prit dans l’intervalle des leçons avec un spadassin italien qui lui enseigna un coup de revers inconnu jusque-là (Jarnac n’est donc pas l’inventeur du coup qui porte son nom). Ce maître d’escrime avait également prévu d’exploiter une faiblesse de La Châtaigneraie : une vieille blessure reçue au genou, en choisissant une arme lourde, l’épée à deux mains, afin de le fatiguer, et de le ralentir dans ses déplacements.

Le duel eut lieu le 10 juillet 1547. Le début de la rencontre fut en faveur de La Châtaigneraie, grand favori, jusqu’au moment où Chabot put placer ce coup de revers, qui fendit le jarret de son adversaire. Le coup était régulier et, à la surprise générale, Chabot fut déclaré vainqueur.

On dit que La Châtaigneraie, s’attendant à remporter facilement le duel, avait prévu de donner un superbe repas le jour même du duel. En tout cas, il fut tellement humilié de cette défaite qu’il arracha le soir venu les pansements de sa blessure et il mourut dans la nuit.

Légendes du Sud-Ouest : La botte du dandy

Le coup de Jarnac n’a pas eu pour cadre la petite cité saintongeaise des bords de Charente mais l’esplanade du château de Saint-Germain-en-Laye. Guy Chabot de Saint-Gelais, seigneur de Montlieu, est venu à bout de son adversaire devant la cour et le peuple réunis.

Ce jour-là, le jeune Chabot, qui ne deviendra baron de Jarnac qu’à la mort de son père, défait contre toute attente le champion du roi Henri II et de sa maîtresse Diane de Poitiers. La surprise est totale. La mascarade cruelle de ce jugement de Dieu par les armes, de cette ordalie, se retourne contre ses promoteurs. L’événement marque puissamment les esprits, d’autant qu’une foule immense assiste à la joute, qui se conclut par un bain de sang. La déconvenue royale et de la cour a en effet conduit le peuple à se jeter sur les couverts d’argent trop hâtivement dressés par le présomptueux Vivonne, en prévision de son triomphe. Le roi, furieux, fait rétablir l’ordre sans pitié[1].

Notes et références

  1. Cet événement a fait l'objet d'une publication documentée de Jacques Rullier, au Groupe de recherche et d'études historiques de la Charente saintongeaise, à Segonzac en Charente.

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