Vent divin

Vent divin

Kamikaze

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Photo d'un kamikaze pilotant un Mitsubishi Zero (au fond à gauche), étant prêt à frapper le cuirassé USS Missouri

Un kamikaze est un militaire de l'Empire du Japon qui, durant la Seconde Guerre mondiale, effectuait une mission-suicide pendant les campagnes du Pacifique. Il avait pour objectif d'écraser son avion ou son sous-marin sur les navires américains et alliés. C'était une tactique militaire désespérée pour livrer une charge explosive sur une cible avec une probabilité maximale d'atteinte. Au cérémonial de départ d'une attaque, les militaires vouaient allégeance à Hirohito et récitaient un haiku en référence au devoir de sacrifice.

Par extension, ce terme signifie aussi aujourd'hui toute personne qui sacrifie sa vie volontairement dans un attentat-suicide. Plus largement encore, un acte par lequel quelqu'un sacrifie sa carrière, son avenir, est qualifié de kamikaze.

Les authentiques kamikazes étaient des « malgré-nous », contraints à cet acte par l'état-major militaire et la pression sociale, peu d'entre eux étaient réellement fanatisés[1]. Au Japon, l'appellation tokkotai demeure d'usage plus courant.

Sommaire

Étymologie

Kamikaze est un mot composé signifiant « vent divin » en japonais (神風 de Kami - « dieu » et kaze - « vent »).

Shinpū ou Kamikaze ?
Kanjis formant le mot « shinpū » traduit à tort par « kamikaze ».

À l'origine, le mot Kamikaze provient d'un événement historique : l'invasion mongole de 1274. La flotte de Kubilai Khan aborda la baie de Hakata et attaqua les Japonais. Après une journée lourde en pertes pour les Japonais, un typhon se leva et rafla une grande partie de la flotte des envahisseurs, ce qui les obligea à battre en retraite. Les Japonais remercièrent cette intervention de la providence et appelèrent ce typhon « Vent divin » (Kamikaze).

Mais si le mot kamikaze vient bien du japonais, il provient d'une interprétation erronée, de type Kun'yomi, de la part des traducteurs américains ; les kanjis 神 (lit. dieux) et 風 (lit. vent) auraient dû faire l'objet d'une interprétation de type On'yomi, dont la prononciation correcte était Shinpū (神風). En effet, les termes désignant les unités chargées des attaques suicides en 1944-45 sont tokubetsu geki tai (特別攻撃隊), littéralement "unités d'attaques spéciales", expression couramment abrégée en tokkōtai (tok--tai) (特攻隊). Leur nom officiel au sein de la Marine Impériale Japonaise était "shinpū tokubetsu kōgeki tai" (神風特別攻撃隊, c'est-à-dire "unités d'attaques spéciales Shinpū (vent divin)")[2].Le terme de Kamikaze se généralisa dans le monde entier, au point d'être réimporté au Japon où il est devenu courant d'entendre parler de "kamikaze tokubetsu kōgeki tai".

Après la Seconde Guerre Mondiale, le mot fut appliqué à d'autres formes d'attaques suicides pour lesquelles le combattant sacrifie délibérément sa vie (comme dans le cas d'attaques terroristes), ou de manière métaphorique lorsqu'une action présente des risques considérables pour la survie d'un individu.

Histoire

Le porte-avions USS Enterprise touché par un kamikaze, le 14 mai 1945. Le bâtiment ne sera pas réparé avant la fin de la guerre.

À l'été 1944, le quartier général impérial, afin de freiner la poussée ennemie, décide de constituer une unité spéciale d'attaque (Tokkōtai), chargée par son sacrifice d'invoquer les Kami pour réitérer le miracle de 1274 (voir la section Étymologie).

Cette unité était composée en majorité d'étudiants convoqués sous les drapeaux (ils avaient été épargnés jusque-là, devant constituer l'élite du futur empire). Les soldats décollaient sans parachute, et ne revenaient à leur base qu'en l'absence de navires ennemis. L'appel dans cette unité était à la fois un honneur important et une sentence de mort.

La première apparition officielle des kamikazes a lieu pendant la bataille du golfe de Leyte en octobre 1944[3]. Ces escadrons furent formés par le vice-amiral Takijiro Onishi[1].

Seki et les hommes de l'unité « Shikishima » pendant le toast cérémonial, peu avant leur départ pour la première attaque-suicide.
L'arsenal de l'USS St Lo explose après l'attaque Kamikaze.

Le premier était commandé par le lieutenant Yukio Seki. Les 5 « volontaires » kamikazes, menés par le lieutenant Seki pilotaient des A6M5 Modèle 52 « Zero », chaque avion emmenant une bombe de 250 kg. Ils plongèrent délibérément avec leurs appareils sur les navires de l'U.S. Navy dans ce qui est reconnu pour être la première attaque officielle réussie d'un escadron suicide.

L'attaque fut un réel succès puisque quatre des cinq pilotes engagés réussirent à toucher leurs cibles, infligeant ainsi d'importants dommages. Un A6M5, vraisemblablement piloté par le Lieutenant Seki, s'écrasa sur le pont d'envol du porte-avions d'escorte USS St. Lo à 10 h 53. La bombe du Zero explosa sur le hangar de pont bâbord. S'ensuivit un incendie et des explosions secondaires qui, à leur tour, firent sauter des torpilles et la réserve de bombes de l'USS St Lo. Le porte-avions sombra une demi-heure plus tard, 126 de ses hommes ayant été tués. Avant de partir en mission, le Lieutenant Yukio Seki aurait déclaré ceci : « L'avenir du Japon est bien morne s'il est obligé de tuer l'un de ses meilleurs pilotes. Je ne fais pas cette mission pour l'Empereur ou l'Empire… Je la fais car j'en ai reçu l'ordre ! »[4] Environ quarante navires américains et alliés furent coulés de cette façon, et une centaine endommagés.

Les plus grosses attaques ont eu lieu à Okinawa, lors des opérations Kikusui, mettant en jeu plus de 400 avions suicides, ainsi que les premiers Ohka. À Okinawa, les Américains ont perdu 20 navires coulés par des kamikazes (contre 9 par attaques conventionnelles) pour plus de 200 touchés à des degrés divers.

À plusieurs reprises, des avions japonais se sont également jetés en plein vol sur d'autres avions américains, notamment des bombardiers lourds croisés en chemin.

Les kamikazes utilisaient généralement des Mitsubishi Zéro, ou tout autre appareil dépassé. En pratique, toutes sortes d'avions ont été utilisés. Des modèles particulièrement rudimentaires ont même été développés spécialement pour les attaques spéciales, comme le KI-115, particulièrement rustique. On peut aussi citer le remarquable D4Y4, un bombardier en piqué muni de fusées pour améliorer sa vitesse lors du piqué final. Il existait aussi des vedettes rapides (Shinyô), des sous-marins de poche suicides (Kôhyôteki, kôryû et Kairyû) des torpilles humaines monoplaces à turbines appelées Kaiten (回天 départ vers le ciel en japonais) et des bombes suicides (Ohka), mais les résultats furent décevants pour l'amirauté japonaise. Il est cependant à noter que, concernant les vedettes rapides et les Kaiten, tous les pilotes n'étaient pas prêts à mourir. Ces engins étaient en effet équipés de « trappes d'évacuations rapides » censées permettre à ces pilotes d'échapper à la mort. Cependant elles étaient en pratique inutilisables à grande vitesse.

Les japonais ont également utilisé des parachutistes kamikazes, qui la plupart du temps subissaient de lourdes pertes pour des résultats négligeables. On peut néanmoins citer une attaque réussie : celle de l'aérodrome de Yontan. 9 appareils, emportant chacun 14 paras y ont participé. 4 appareils ont été abattus en chemin et 4 autres par la DCA de l'aérodrome. 10 paras ont pu s'échapper du dernier appareil et ce sont précipités vers les avions américains. Ils ont détruit 9 appareils, en endommageant 26 autres, tout en brûlant 265 000 litres de carburant et en tuant 2 marines (plus 18 blessés).

Après la guerre, l'image des kamikazes au Japon devint ambivalente, à la fois celle d'un passé que le pays voulait abandonner et un pilier de la tradition pour les plus conservateurs[1].

Autres pays

Quel que soit le pays auquel appartient le pilote qui se jette sur sa victime, les pratiques kamikazes sont le plus souvent menées dans une atmosphère de catastrophe et d'action de la dernière chance devant un ennemi toujours plus nombreux et en apparence invincible.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Japon ne fut pas le seul pays à prendre ce genre d'initiatives. En octobre 1944, sous le régime nazi, Goering fit appel en dernier recours à des unités aériennes qui devaient s'écraser sur des objectifs alliés lors de l'invasion du Vaterland. Toutefois, cette action ne fut mise en pratique que de manière très minoritaire par rapport aux frappes massives de l'armée japonaise. De plus, certains pilotes désobéirent à ces ordres, la notion d'honneur n'étant pas comparable avec la vision japonaise[5]. Néanmoins plus d'une centaine de jeunes pilotes de la Luftwaffe se sont portés volontaires ; seuls six d'entre eux ont survécu.

Également, quelques initiatives similaires eurent lieu durant la Première Guerre mondiale et la Seconde Guerre mondiale :

  • Des pilotes russes et allemands sectionnaient les ailes des avions ennemis avec leurs propres ailes ou entraient volontairement en collision avec l'appareil adverse ; pour ces actions sur le Front de l'Est, on parle d'attaque taran ;
  • Des pilotes français se jetèrent volontairement sur des appareils et des troupes allemandes au cours de la bataille de France, notamment à partir de juin 1940 ;
  • Certains pilotes de la Royal Air Force projetèrent leur avion contre les V1 allemands.

Autres sens

Kamikaze est également le nom d'un cocktail.

Il a pris récemment le sens courant d'« auteur d'un attentat suicidaire », à l'image des attentats du 11 septembre 2001, largement répandu par le type d'attentats dont les auteurs, portant à la ceinture un cordon d'explosifs, se font exploser dans des lieux publics, ou conduisent des véhicules piégés qu'ils mènent jusquà leur mort[6].

Bibliographie

  • Ohnuki-Tierney, Kamikaze Diaries: Reflections of Japanese student soldiers, University of Chicago Press, 2006.
  • L'Aventure Kamikaze 1944-1945, Jean-Jacques Antier, Presses de la Cité, 2005, 265 pages, (ISBN 2-2580-6764-2).
  • Christian Kessler, « Kamikazes : pour l’empereur, contre l’Amérique ! », L’Histoire, no 299, juin 2005, p. 74 à 80, (ISSN 0182-2411)
  • J'étais un kamikaze de Ryuji Nagatsuka

À propos des actions kamikazes françaises de la bataille de France :

  • Daniel Chauvin, La bataille de France, Édition du Lombard, 2003, (ISBN 2-8036-1933-4)
  • Revue Les Ailes françaises 1939-1945, notamment les nos 3 et 4 traitant de la bataille de France, éditée par les éditions TMA.

Notes et références

  1. a , b  et c (fr) Kamikazes malgré eux, de Philippe Pons dans le quotidien Le Monde du 14 février 2007
  2. Kamikaze, Cherry Blossoms, and Nationalisms: The Militarization of Aesthetics in Japanese History, pag. 159. Autor:Emiko Ohnuki-Tierney.University of Chicago Press, 2002 (ISBN 0-2266-2091-3)
  3. D'autres historiens font remonter la première attaque de ce style à mai 1944 ; voir (en) First Kamikaze
  4. Extrait de Kamikaze - Japan's Suicide Gods, page 16, écrit par Albert Axell, écrivain américain, et Hideaki Kase, vivant à Tokyo).
  5. Antony Beevor, La Chute de Berlin. ISBN 2-253-10964-9
  6. Afghanistan : l'évasion kamikaze - M6 info

Voir aussi

Lien externe

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