Rustinu

Rustinu

Le Rustinu ([uru∫ti: nu] prononcé comme "ourouchtii-nou"), est une pieve de Haute Corse, située dans la Castagniccia.

Sommaire

Géographie

L'Alpa au hameau de Terchini (Merusaglia)

Le Rustinu est situé au Nord-ouest de la Castagniccia, en limite du Parc naturel régional de Corse. Il se compose des communes de :

Les trois dernières communes font partie géographiquement de la Casaluna.

En 2007 le Rustinu compte 1 909 habitants[1].

Histoire

Préhistoire

Les découvertes lors de fouilles effectuées de 1983 à 1985 sur la colline de Rusumini - commune de Castineta témoignent de l'occupation du site à l'Âge du Bronze. Le sommet de la colline de Rusumini porte une enceinte et des structures diverses : fondations d'une tour sommitale et terrasses occupées par des restes d'habitations à proximité d'un point d'eau[2].

Moyen Âge

Au XIe siècle, le Rustinu dépendait des marquis de Massa di Corsica dont le pouvoir s'étendait sur tout l'« en deçà-des-Monts ». En 1250, malgré leur appauvrissement lié aux luttes menées contre leurs vicomtes, anciens vassaux en révolte, il leur restait encore une grande partie des terres dont les châteaux de Rustinu[3].

Temps modernes

Au XVIe siècle vers 1520, la pieve de Rustinu comptait environ 3 250 habitants. À cette époque, les lieux habités étaient Saliceto, Vicinato, lo Borgo, Chiamachie, Gavignani, la Petragrossa, Castineta, Sevasi, la Terchina, la Fogatella, la Brocca, Casabiti, Tarlagia, lo Collo, Grate, la Valle, Frasso, Pastorechia, le Balleciasce, Piano, Caniolo, Petralata, lo Vignale, Mileto, Bisinchi, Lesca[4]. il convient d'ajouter à cette liste Espaco, hameau de Bisinchi au nord de la commune.

Le Rustinu dans la révolte contre Gênes

Au XVIIIe siècle, le Rustinu et les pieve d'Ampugnani, de Vallerustie, d'Orezza et d'Alesani ont formé le réduit de l'indépendance corse contre l'occupant Génois. Sous prétexte de dédommager la métropole de ses frais d'occupation militaire, les impôts avaient été augmentés par un règlement du 28 janvier 1733. « Au mois de juin, les fonctionnaires génois avaient reçu l'ordre de convoquer, au chef-lieu de chaque piève, les députés des villages, de leur faire prêter serment au nouveau règlement et de réclamer leur adhésion aux projets financiers du suzerain. La mauvaise volonté fut partout visible. Dans la piève de Rostino, en particulier, où le peuple échappait, par son isolement, à l'emprise génoise, la résistance fut plus courageuse que partout ailleurs. A l'invitation des commissaires, Giangiacomo Ambrosi, de Castineta, refusa de prendre tout engagement au nom de ses concitoyens. Il quitta l'Assemblée en prononçant ces mots : « Io so di Castineta e mi ritiro. » Son exemple fut suivi par Paul-François Giovannoni, délégué de Saliceto. Leur ami, Giacinto Paoli, de Morosaglia, se joignit à eux »[3].

Dans sa chronologie de la « Grande révolte des Corses contre les Génois » qui dura 40 ans, de 1729 à 1769, A-D. Monti rapporte les évènements suivants[5] concernant le Rustinu :

  • 1729 : les prémices de la révolte
    • 30 septembre : 150 soldats supplémentaires sont promis au gouverneur pour mettre fin à la guerre que se font, depuis deux ans, les communautés de Merusaglia et Castineta au sujet de pacages. Le Magistrato chargé des affaires de Corse auprès du Sénat de Gênes demande à Pinelli gouverneur à l'époque, de se rendre personnellement dans le Rustinu (Merusaglia).
    • 27 décembre : le lieutenant (représentant du pouvoir exécutif à la tête d'une province) de Corte se transporte dans le Boziu dont les habitants refusent de payer la taxe des deux seini, arguant que le contrat passé entre le Sénat de Gênes et les Corses avait été établi pour dix ans et n'avait pas été renouvelé. Le Boziu agissait en accord avec le Rustinu qui avait désarmé les sbires venus pour imposer le versement de la taxe.
  • 1730 : Premier soulèvement
    • Les habitants refusant de payer, le gouverneur envoie des soldats dans les pieve en rébellion. Le Boziu et le Rustinu refusent de revenir sur leur décision.
    • 22 au 26 février : le gouverneur demande au révérend Casabianca, au docteur Limperani d'Orezza, au noble Ghjacintu Paoli de Rustinu, à Ghjuvan Felice de Ficaghja, de ramener à la paix les pieve d'Orezza (Pedicroce), Ampugnani (A Porta), Casacconi (Campile) et Rustinu.
    • Décembre : la révolte est générale.
    • 1731 16 mai : la consulte confirme la suspension des hostilités jusqu'à fin mai ; ils souhaitent la prolonger jusqu'à fin août et proposent d'envoyer deux députés à Bastia. Le piuvanu Aitelli, de Rustinu, et le chanoine Ilario seront reçus par les commissaires. Aucune promesse ne leur sera faite quant aux demandes des Corses, les commissaires exigeant la soumission sans conditions des Généraux, et la prolongation de l'armistice sera refusée.
  • 1732 Intervention de l'Empereur d'Allemagne. Le prince de Wurtemberg demande aux Corses pour rentrer dans l'obéissance de la République.
    • 2 mai : Les généraux corses envoient Ghjacintu Paoli, le piuvanu Aitelli, le P. Carlu Francescu Raffalli, députés, au général Samuel von Schmettau des forces impériales, à Rustinu, pour demander une suspension d'armes et la liberté de venir traiter eux-mêmes sur parole du général.
  • 1733 Deuxième soulèvement.
    • Juillet : Paolo Geronimo Pallavicini est nommé commissaire général en remplacement de Rivarola. Réputé homme cruel, il est choisi pour mener une politique sévère. Il reste connu pour avoir conçu le dessein de vider la Corse de ses habitants et de les remplacer par des sujets plus dociles.
    • Août : Pallavicini convoque individuellement les notables des pieve pour leur donner des instructions au sujet du ramassage des armes, de la levée des impôts et de l'extinction des inimitiés. Certains, flairant un piège, se dérobent, en particulier ceux du Rustinu : Ghjacintu Paoli, Ghjuvan Ghjacumu Ambrosi, de Castineta, et Paulu Francescu Giovannoni, du Salgetu, dit Salicetu.
    • Septembre : avant l'heure, Pallavicini exige le paiement des tailles ordinaires. Le Rustinu refuse.
    • 15 novembre : Pippo, capitaine des troupes génoises à Corti, quitte son cantonnement pour le Rustinu avec 50 soldats.
    • 16 novembre : Gagliardi va au couvent Saint-Antoine des Servites de Casabianca. Pippo pénètre dans le Rustinu. Au Salgetu, il est désarmé. Petru Casale, du Nebbiu, récemment inscrit sur le livre de la noblesse génoise, est nommé député dans le Rustinu par le commissaire général pour parlementer avec les notables du lieu ; ceux-ci se montrent intraitables. Les assemblées génoises, informées des troubles du Rustinu, publient un édit qui demande aux habitants de remettre les armes avant 15 jours et promet des sauf-conduits aux procureurs des communautés ou aux individus qui voudront exposer leurs doléances aux autorités.
    • 22 décembre : une grida (édit) des populations du Rustinu remet en vigueur les anciens Règlements de la Nation concernant l'union sacrée et la tranquillité publique.
    • 24 décembre : une nouvelle grida interdit tout commerce avec les pieve de l'intérieur et les présides.
    • 26 décembre : le Rustinu interdit aux habitants de Tavagna, qui, gagnés à la nouvelle révolte, pouvaient se livrer à des excès, de s'approprier les biens du Révérend Consalvi.
  • 1734 : ...
    • 1er janvier : le Rustinu convoque les élus des communautés et les notables à une consulte. Des armes et des munitions, en grande quantité, sont débarquées entre la Padulella et San Pelegrinu. Elles sont distribuées aux pieve de Rustinu, Orezza, et Tavagna, les plus engagées dans la nouvelle révolte.
  • 1736 : ... Le Sénat de Gênes se réunit pour juger le gouvernement de F. Pinelli. Il décide de rappeler son commissaire et de le remplacer par Lorenzo Imperiali et Paoli Battista Rivarola. Ce dernier arrive seul en fin janvier.
    • 21 mars : les chefs du Rustinu décident une consulte au couvent de la Casabianca pour les 9, 10 et 11 avril. Il s'agit d'élire 3 députés chargés de prendre contact avec le commissaire génois. Sans attendre les conclusions de la consulte, les Généraux envoient Ghjacumu Francescu Pietri, de Tagliu, auprès de Rivarola. Le bruit se répand de l'arrivée d'un personnage important (Roi Théodore).
  • 1739 Intervention du Roi de France
    • 16 juin : le commandant français (Maillebois) installe son Q.G. à Pastureccia. M. du Rousset, désarme le Rustinu.
  • 1741 Dans les premiers remous de la guerre de la succession d'Autriche
    • Juillet : 3 bataillons, les hussards et une partie des canonniers quittent la Corse. Les troupes françaises sont réduites à 1400 hommes environ. Les Génois relèvent les Français dans les postes de Casinca, Campulori et Rustinu.
  • 1744 : ...
    • 21 mai : le Père Léonard des Mineurs réformés, arrive à Bastia. La mission du célèbre prédicateur qui est de ramener les Corses à l'obéissance, débute au couvent de Marana. Le 25 juillet il est dans le Rustinu.
    • 3 août : de Rustinu, le P. Léonard envoie un messager au gouverneur pour l'informer de l'imminence de la révolte et lui dire qu'il est urgent de faire connaître les concessions accordant les plus larges satisfactions aux revendications insulaires.
    • 16 août à Caccia, le P. Léonard reçoit le texte des concessions que lui adresse le gouverneur. Il le commente longuement aux populations assemblées de Caccia et de Rustinu.
  • Deuxième intervention française
    • 1749, le 22 mai : le marquis de Cursay, colonel du régiment de Tournaisis, s'embarque à Gênes pour introduire 400 soldats dans Bastia. Il a pour mission de conserver les places maritimes, d'animer le parti fidèle et d'intimider les rebelles au nom du roi de France, sans parler de les soumettre à la République. le 6 juin Cursay quitte Bastia pour Porti Vechju, Bonifaziu et Aiacciu. Il quitte Aiacciu le 21. Le 22 il est à Corti, le 28 à Rustinu et le 29 à Bastia.
  • 1752 : ...
    • Mars. Des milliers de Corses du Nebbiu, des Costere, du Rustinu et de la Casinca, offrent leurs services à Cursay qui les refuse.
  • 1754 : ...
    • 21 juillet : une lettre des capucins du Rustinu fait état d'un appel lancé par leur Provincial, le P. Gaetano, à Pasquale Paoli pour qu'il vienne en Corse soutenir la révolte.
Pascal Paoli
  • 1755 : Le gouvernement de Pascal Paoli. P. Paoli organise la commission ambulante, composée de lui-même et de magistrats, chargée d'une tournée pour rechercher les auteurs de crime et assurer la pacification du pays avec la participation de troupes de soutien.
    • 4 août : la commission ambulante quitte Corti pour le Rustinu, l'Ampugnani et la Tavagna, après avoir publié un décret interdisant la vendetta.
    • 26 août : pendant que Paoli licencie les hommes qui venaient de combattre victorieusement et se rend dans le Rustinu, son rival Matra regroupe ses adhérents et se dirige vers Alisgiani et Orezza. Il lutte contre Paoli et se fait tuer lors de l'attaque du couvent d'Alando.
  • 1768 La Corse française
    • Dans la nuit du 16 au 17 septembre, les Corses se portent au pont du Golu, obligeant les Français à évacuer la Casinca pour ne pas être encerclés.
  • 1769
    • 8 mai : Les Corses se lancent à l'assaut de Lento et de la Bocca San Ghjacumu (col Saint-Jacques); ils bousculent les Français et sentent que la victoire est à leur portée, mais Paoli, qui surveille les opérations d'une hauteur de l'autre côté du Golu, a négligé de protéger les flancs. Deux colonnes françaises sortent de Bigorno et Canavaggia ; les Corses, pris à revers, sont forcés à une retraite désordonnée vers le pont du Golo (Ponte-Novu - Castello-di-Rostino) sous le feu plongeant des armes françaises. De l'autre côté du Golu, Gentili, obéissant aux ordres reçus, refuse le passage du pont jusqu'à ce que Paoli lui commande de se retirer. La nuit met fin au combat qui se termine dans la plus grande confusion.
    • 16 mai : les Français passent le Golo et campent au-dessus de Valle-di-Rostino.
    • 17 mai : le comte De Vaux occupe le Rustinu tout en respectant Merusaglia que Clemente Paoli quitte pour Corti où était réfugié son frère Pascal.
    • 24 mai : Achille Murati, Petru Colle, du Rustinu, et les responsables de la Balagne, soit près de 180 hommes, s'embarquent à L'Île-Rousse sur un bateau anglais qui les emporte à Oneille.
Article détaillé : De Vaux gouverneur de Corse.

Cette microrégion[6] constitua, en 1789, le "cantone di Rostino" (en toscan écrit), puis, dans la première moitié du XIXe siècle, le "cantone di Morosaglia", et enfin, jusqu'en 1973, le "canton de Morosaglia".

A cette date, le Rustinu a été regroupé avec la pieve de Caccia (ex canton de Castifao), pour constituer l'actuel Canton de Castifao-Morosaglia.

Patrimoine

L'eglise pievane de Santa Maria Riscamone à E Valle di Rustinu
L'eglise pievane de Santa Maria Riscamone à E Valle di Rustinu
  • Eglise pievane, vestiges du baptistère paléochrétien (peut-être un de plus vieux de la chrétienté), et baptistère médiéval de Santa Maria di Riscamone, aux Valle (com. Valle-di-Rostino). L'église comprend une abside préromane du IXème ou du Xème siècle et une façade du XVème bâtis sur des ruines romaines.
  • Chapelle San Pantaleu (Gavignano) des IXe, XIe et XVIe siècles, classée Monument historique[7].
  • Chapelle San Tumasgiu à Castellu (com. Castello-di-Rostino), avec fresques.
  • Musée Pascal Paoli à Merusaglia (com. Morosaglia).
  • Nombreux hameaux et maisons traditionnelles à Merusaglia (com. Morosaglia).
  • Pont de Ponte Novu, village de la commune de Castello-di-Rostino, lieu de la Bataille de Ponte Novu qui mit fin à l'indépendance de la Corse en 1769.
  • Vestiges du château médiéval d'U Pinzu, à Castellu di Rustinu (com. Castello-di-Rostino).
  • Site préhistorique dit communément Castellu di Rusumini (com. Castineta). Ses monuments turriformes, rappelant ceux du Sud de l'île, dominent la route D39, en amont du pont sur la Casaluna.
    Article détaillé : Site de Risumini.
  • Site préhistorique E Muzzelle (com. Valle-di-Rostino). Eperon barré du Pinzalone, spectaculaire rocher qui domine la Route nationale 193, et le pont de chemin de fer du même nom (Pont de Pinzalone).
  • U Castella site préhistorique (cf. sur cartes l'appellation déformée Punta Castellare (1 060 m). U Castella est situé « à cheval » sur les communes de Saliceto et de San-Lorenzo.

Voir aussi

Liens externes

Notes et références


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