Premier choc pétrolier

Premier choc pétrolier

Le premier choc pétrolier s'est produit en 1973 ; ses effets se font sentir jusqu'en 1978.

Les 16 et 17 octobre 1973, pendant la guerre du Kippour, les pays arabes membres de l'OPEP, alors réunis au Koweït, annoncent un embargo sur les livraisons de pétrole contre les États « qui soutiennent Israël ».

Sur cette photo datée de 1974, un passant s'enquiert des nouvelles concernant le rationnement de l'essence dans le journal. Il se situe à proximité d'un panneau de station service indiquant qu'il n'y a plus d'essence en vente (« Sorry. No Gasoline »).

Leurs revendications portent sur :

  • l'augmentation spectaculaire du prix du brut et plus précisément la quote-part de ce prix revenant aux « États producteurs » ;
  • le contrôle absolu des niveaux de la production afin de maintenir un prix « artificiellement » élevé du brut ;
  • la participation croissante, de la part de ces pays, aux opérations de production entraînant la disparition progressive du brut revenant aux sociétés concessionnaires (dit « brut de concession ») au profit du brut qui revient à l'« État hôte » (dit « brut de participation »).

Sommaire

Causes profondes

La fin du système monétaire de Bretton Woods

Pour beaucoup d'économistes, le premier choc pétrolier en 1973 est la conséquence directe de la réaction de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) à la forte baisse du dollar suite à la fin des accords de Bretton Woods. Le 15 août 1971, les États-Unis suspendent la convertibilité du dollar en or permettant au dollar de « flotter ». Le système des taux de change fixes s'écroule définitivement en mars 1973 avec l'adoption du régime de changes flottants. Le résultat en est une dépréciation de la valeur du dollar américain, monnaie dans laquelle les prix du pétrole sont fixés et a pour conséquence pour les producteurs de pétrole un revenu inférieur pour le même prix nominal. Le cartel de l'OPEP publie un communiqué conjoint indiquant que dorénavant, le prix du baril de pétrole serait fixé par rapport à l'or. Après 1971, l'OPEP est lente à rajuster les prix pour tenir compte de cette dépréciation. De 1947 à 1967, le prix du pétrole en dollars américains a augmenté de moins de 2% par an. Jusqu'au choc pétrolier, le prix est resté relativement stable par rapport aux autres devises et matières premières qui sont soudainement devenues très volatiles par la suite. Les ministres de l'OPEP n'avaient pas élaboré de mécanismes institutionnels permettant de mettre à jour rapidement ces prix pour suivre l'évolution du marché, de sorte que leur revenu réel connut un décalage de plusieurs années par rapport aux autres matières premières. Les hausses de prix substantielles de 1973-74 ont largement rattrapé ces écarts de revenus en comparaison d'autres produits tels que l'or[1].

Déroulement des faits

Les Etats-Unis, premier producteur de l'époque, atteignent leur pic de production pétrolière en 1970, ce qui amène aux premières pénuries aux USA. Suite à cela, Nixon demande un audit des capacités de production, audit non divulgué à la presse et effectué par James Akins, les résultats sont qu'il n'y a aucune capacités de production supplémentaires[2].

L'Arabie saoudite réalise alors 21 % des exportations mondiales de brut. Le roi Fayçal, pourtant ami des Américains, déplore leur soutien inconditionnel à Israël qui met en danger selon lui les régimes arabes modérés, entre autres celui de Sadate en Égypte. Lors de la guerre du Kippour, Richard Nixon approvisionne en armement l'État hébreu réduit à la défensive, face à l'attaque égypto-syrienne ravitaillée par les Soviétiques. En réponse, les pays du Golfe augmentent unilatéralement, sans l'accord des compagnies, de 70 % le prix affiché du baril de brut. La vérité est qu'une augmentation du prix, en particulier suite au pic de production aux Etats-Unis, était nécessaire aux majors occidentales pour pouvoir démarrer la production de pétrole plus cher, typiquement en off-shore dans le Golfe du Mexique ou Mer du Nord, ou en Alaska, la diplomatie Américaine ainsi que les compagnies pétrolières occidentales étaient donc tout à fait favorable à cette augmentation de prix, est l'on en fait aussi suggérée, à travers James Akins en particulier[3].

Le 17 octobre 1973, les représentants des pays arabes pétroliers (OPAEP), réunis à Koweït, décident une réduction mensuelle de 5 % de la production pétrolière jusqu'à évacuation des territoires occupés et reconnaissance des droits des Palestiniens. Le 20 octobre, Fayçal décide un embargo total sur les livraisons destinées aux États-Unis, puis aux Pays-Bas. Le prix du baril sur le marché libre passe de 3 à 18 dollars en quelques semaines. Fin décembre, les pays de l'OPEP réunifient le prix du baril à 11,65 $. Entre le mois d'octobre 1973 et le mois de janvier 1974, le prix du baril du brut de référence qu'est l'« Arabe léger », est quadruplé, passant de 2,32 $ à 9 $. Dans ce prix, l'« État producteur » prélève, en 1973, 2,09 $/baril et 8,7 $/baril en janvier 1974 soit plus de quatre fois plus.

La pénurie suscite une sorte de panique ; les prix poursuivent leur ascension vertigineuse : ils quadruplent à la suite des augmentations d'octobre et de décembre. Les pays consommateurs réagissent d'une manière désordonnée, cherchant à tirer leur épingle du jeu. L'Agence internationale de l'énergie (AIE), créée à cette occasion, n'est pas en mesure d'établir un certain ordre et ce sont les grandes compagnies elles-mêmes qui sont chargées de répartir le rationnement d'une manière égale en jouant sur les sources d'approvisionnement arabes et non arabes.

Certains pays arabes souhaitent une réduction de la production pour maintenir les prix à la hausse. Mais les États-Unis refusent cette perspective. Ils tentent de constituer un cartel international de consommateurs face à l'OPEP mais échouent en raison de l'opposition de la France. Pour s'opposer à toute diminution de la production, les États-Unis sont prêts à intervenir militairement dans la péninsule arabique pour prendre le contrôle des principaux champs pétrolifères. A défaut d'une intervention, ils sont disposés à faire de l'Iran le gendarme du golfe Persique.

Après le VIe sommet arabe d'Alger (26-28 novembre 1973), les États-Unis doivent infléchir leur politique jugée trop favorable à Israël, tout comme l'Europe occidentale et le Japon. Le 18 mars 1974, Sadate obtient la levée de l'embargo.

L'année suivante, le roi Fayçal est assassiné par un neveu, rentré des États-Unis.

Classification des pays

Après la réunion de l’OPAEP du 05 novembre 1973, à Koweït, il fut décidé de classer les pays [4] :

  • Pays amis : Tous les pays qui acceptaient de déclarer qu’Israël devait libérer les territoires occupés en 1967 et 1973. C’est-à-dire tous les pays africains (à l’exception de l’Afrique du Sud et de la Rhodésie), les pays asiatiques et d’Amérique du Sud, les pays socialistes, ainsi que la France et l’Espagne.
  • Pays ennemis : Essentiellement les États-Unis et les Pays-Bas.
  • Pays neutres : Les autres pays.

Résultat à long terme

Les stations d'essence laissées à l'abandon pendant la crise furent parfois reconverties. C'est le cas de cette station de Potlatch (État de Washington) qui devint un centre prosélyte du réveil religieux.

De fait, l'OPEP ne retrouvera plus un tel niveau de puissance sur le plan économique et politique et les objectifs affichés de l'embargo ne seront pas atteints. Les politiques d'amélioration du rendement énergétique se mettent en place à partir de ce moment ainsi que la diversification des sources d'énergie, la France, par exemple développant un programme massif de constructions de centrales nucléaires. Le nucléaire ne modifiera pas la dépendance au pétrole, mais permettra une alternative énergétique à cette dépendance qui trouvera un écho dans le monde entier.

Notes et références

  1. Black Gold, The End of Bretton Woods and the Oil-Price Shocks of the 1970s David Hammes Douglas Wills, The Independent Review, Vol. IX Num. 4, Printemps 2005
  2. Documentaire "la face cachée du pétrole", de Patrick Barberis et Eric Laurent, arte edition
  3. documentaire "la face cachée du pétrole", de P Barberis et E Laurent, arte editions
  4. Hocine Malti, Histoire secrète du pétrole algérien, La Découverte 2010, pp 217 - 218

Annexes

Articles connexes

Lien externe


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