Anténor (Sculpteur)

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Anténor (sculpteur)

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Anténor (en grec ancien Ἀντήνωρ / Antếnôr) est un sculpteur athénien archaïque dont la période d'activité va de 510 à 485 av. J.-C.

Sommaire

Biographie

Dans une signature épigraphe, Anténor se présente lui-même comme « fils d'Eumarès », cité par Pline l'Ancien comme un peintre particulièrement inventif[1] et mentionné sur une base inscrite provenant de l'Acropole. Une base parcellaire provenant du même endroit fait état d'un dénommé « …andros, fils d'Eumarès »[2], qui serait donc le frère d'Anténor : celui-ci est le membre d'une dynastie d'artisans.

Une statuette masculine du musée du Louvre, datée de 530-520 av. J.-C. et de réalisation insulaire, porte l'inscription « Je suis (la statue) de Dionysermos, fils d'Anténor »[3]. On a donc proposé d'y voir le fils de notre sculpteur[4]. Ce rapprochement a été contesté, le contexte et la localisation de l'œuvre ne présentant aucun rapport avec le sculpteur athénien[5].

Parmi les œuvres attribuées figurent d'une part un groupe représentant les Tyrannoctones, représentant les Athéniens Harmodios et Aristogiton, assassins du tyran Hipparque ; d'autre part le fronton Est du temple archaïque de Delphes, financé par les Alcméonides, ennemis des tyrans et alors en exil : on a voulu voir en Anténor un artiste engagé. D'autres auteurs en doutent, estimant qu'il était simplement un artiste reconnu et apprécié, attirant à lui des commandes sans contenu politique[5].

Œuvre

Le groupe des Tyrannoctones

Anténor n'a longtemps été connu que par une mention de Pausanias[6] faisant de lui l'auteur du groupe des tyrannoctones. Très célèbre dans l'Antiquité, ce groupe est la première œuvre consacrée à titre officiel dans la cité. Son histoire est mouvementée : emporté par le roi perse Xerxès Ier lors du sac d'Athènes de 480 av. J.-C., il est remplacé par un groupe dû à Critios et Nésiotès. Les statues sont ensuite restaurées par Alexandre le Grand ou l'un de ses successeurs. Il subsiste des fragments de la base, qui remontent sans doute à la restauration de l'œuvre et non à la première installation.

Les deux statues du Musée national archéologique de Naples trouvées à la villa Adriana et aujourd'hui connues comme le « groupe des Tyrannoctones »[7], sont plus probablement des copies du groupe de Critios que de celui d'Anténor[8]. La « Tête Webb » du British Museum (Inv. 2728), une copie romaine d'une tête de kouros originale remontant à 500 av. J.-C., a été proposée comme une réplique de la tête originale d'Harmodios, dans l'hypothèse où le groupe ait daté de la fin du VIe siècle av. J.-C.[9] Enfin, des fragments de moulage se rattachant au groupe (une partie de la tête d'Aristogiton, des fragments des membres et des costumes) ont été retrouvés dans l'atelier de reproduction de Baïes (près de Naples). La barbe d'Aristogiton, courte et finement striée, situe le prototype avant les autres têtes en marbre, qui relèvent du style sévère — ce qui en ferait un moulage du groupe d'Anténor si celui-ci a été réalisé après Marathon[10].

La « korê d'Anténor »

Les 5-6 février 1886 sont mises au jour au nord-ouest de l'Érechthéion une korê en deux morceaux et une base inscrite, toutes deux conservées au musée de l'Acropole d'Athènes sous le numéro d'inventaire 681. La base porte un stoïchédon de 23 lettres qui précise l'identité du dédicant : un certain Néarchos. La restitution la plus vraisemblable ajoute derrière le nom [hο κεραμε]υς, dont on ne sait pas avec certitude s'il s'agit d'un nom de dème (« Néarchos, du quartier du Céramique ») ou d'une profession (« Néarchos, le potier »)[5]. On connaît effectivement un potier attique nommé Néarchos qui signe des vases de 570 à 540 av. J.-C., ce qui pose un problème de datation : ou bien Néarchos a vécu passablement vieux, ou bien les signatures s'étalent sur trois générations — l'usage grec est que le fils aîné porte le nom de son grand-père paternel[11].

La dédicace restituée[12] indique :

Νεαρχος ανεθε̄κε[ν hο κεραμε]
υς εργον απαρκε̄ν ταθ[ε̄ναιαι]
Αντε̄νο̄ρ επ[οιε̄σεν h
ο Ευραμος τ[ο αγαλμα]
« Offrande du potier Néarchos à Athéna en dîme de ses travaux.
Anténor, fils d'Eumarès, a réalisé la statue. »

En 1887, on associe pour la première fois la base inscrite et la statue de la korê[13]. Contesté et défendu à plusieurs reprises par la suite[14], le rapprochement se fonde sur plusieurs arguments. D'abord, la base est trouvée avec un fragment de la statue, tous les fragments venant de la même zone. Ensuite, la base a fait l'objet d'une attention particulière de la part du sculpteur[5] : la hauteur de la base complète est égale à deux fois celle de l'abaque. Un axe vertical central commande la répartition des lettres du stoïchédon, mais aussi la pose de la statue, nettement symétrique. Enfin, base et statue relèvent du même schéma de proportions[5] : la hauteur de la base (28,5 cm) est égale à celle de la tête (28,8 cm), laquelle représente un septième de la hauteur de la figure (2,01 mètres).

La korê elle-même tranche avec les autres korai de la même époque : elle ne représente pas une jeune fille mais une femme à l'air assuré et volontariste, dans laquelle on s'est plu à reconnaître la courtisane Leæna (littéralement « la lionne »), amie des tyrannoctones et torturée à mort après l'assassinat d'Hipparque[15].

Autres attributions

On attribue encore à Anténor les sculptures du fronton Est du temple dit « des Alcméonides » à Delphes, en raison de l'analogie du traitement du corps et des vêtements entre les figures tympanales féminines et la korê 681[8]. La korê 669 du musée de l'Acropole d'Athènes, qui porte en outre une inscription mentionnant Eumarès[16], lui est également rattachée.

Notes

  1. Pline l'Ancien, Histoire naturelle [détail des éditions] [lire en ligne] (XXV, 56).
  2. EM 6240 = Inscriptiones Græcæ I, 760.
  3. Ma 3600 = MND 2283. Marianne Hamiaux, Les Sculptures grecques 2, Paris, 1998, no 51, p. 59-60.
  4. Georges Daux, « Dionysermos, fils d'Anténor, au Louvre », dans Bulletin de correspondance hellénique, XCI no 2 (1967), p. 491-493.
  5. a , b , c , d  et e Viviers [2007].
  6. Pausanias, Description de la Grèce [détail des éditions] [lire en ligne] (I, 8, 5).
  7. Naples G 103 et G 104.
  8. a  et b Boardman, p. 83.
  9. José Dörig, Anike Kunst, XII, 41 et suivantes.
  10. Christa Landwher, Die Antiken Gipsabgüsse aus Baiæ: griechische Bronzestatuen in Abgüssen römischer Zeit, Archäologische Forschungen no 14 (1985), Berlin, p. 109-111.
  11. Sarah B. Pomeroy, Families in Classical and Hellenistic Greece. Representations and Realities, Oxford University Press, 1997, p.72-73.
  12. Inscriptiones Græcæ I, 628.
  13. Franz Studniczka, « Antenor der Sohn des Eumares und die Geschichte der archaischen Malerei », dans Jahrbuch des Deutschen Archäologischen Instituts no 2 (1887), p. 161.
  14. Principalement : contestation de Humfry Payne et Gerard M. Young, Archaic marble sculpture from the Acropolis, Manchester, 1936 ; mise au point par Pierre de la Coste-Messelière, Les Corés de l'Acropole, 1940.
  15. P. de la Coste-messelière, op. cit.
  16. Inscriptiones Græcæ I, 627.

Bibliographie

  • John Boardman (trad. Lucie Marignac), La Sculpture grecque archaïque [« Greek Sculpture: the Archaic Period »], Thames & Hudson, coll. « L'Univers de l'art », Paris, 1994 (1re édition 1978, révisée en 1991) (ISBN 2-87811-076-5) , p. 83.
  • Marion Muller-Dufeu, La Sculpture grecque. Sources littéraires et épigraphiques, éditions de l'École nationale supérieure des Beaux-Arts, coll. « Beaux-Arts histoire », Paris, 2002 (ISBN 2-84056-087-9) , p. 201-205.
  • Didier Viviers, « Anténor, sculpteur engagé ? », communication au colloque « Figures d'artistes dans l'Antiquité grecque : les limites de la monographie, organisé au musée du Louvre, 24 mars 2007.
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