Léon Tolstoï

Léon Tolstoï
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Léon Tolstoï
Léon Tolstoï Photographié par Sergueï Prokoudine-Gorski.
Léon Tolstoï
Photographié par Sergueï Prokoudine-Gorski.

Nom de naissance Lev Nikolaïevitch Tolstoï
Activités Romancier
Naissance 9 septembre 1828
Iasnaïa Poliana,
Flag of Russia.svg Empire russe
Décès 20 novembre 1910 (à 82 ans)
Astapovo,
Flag of Russia.svg Empire russe
Langue d'écriture Russe
Mouvement Réalisme
Genres Roman, nouvelle, essai, théâtre
Œuvres principales

Léon Tolstoï, de son vrai nom le comte Lev Nikolaïevitch Tolstoï (en russe : Лев Николаевич Толстой), né le 9 septembre 1828 (le 28 août selon le calendrier julien) à Iasnaïa Poliana en Russie et mort le 20 novembre 1910 (le 7 novembre selon le calendrier julien) à Astapovo, est un des écrivains majeurs de la littérature russe, surtout par ses romans et ses nouvelles, riches d'analyse psychologique et de réflexion morale et philosophique.

Ainsi, l'une de ses grandes œuvres, Guerre et Paix (1869), est une reconstitution historique et réaliste des guerres napoléoniennes en Russie, mais c'est aussi une réflexion sur la violence inspirée par des conflits comme la guerre de Crimée (1853-1856) durant laquelle il a été mobilisé et qu'il relate dans les Récits de Sébastopol.

Par ailleurs, Tolstoï entame à partir des années 1870 une quête spirituelle et religieuse qui se reflète dans ses œuvres : il multiplie alors les considérations philosophiques qu'il mêle aux événements romanesques comme dans Anna Karénine, l'histoire d'une passion dramatique dont la publication finale date de 1877, et plus encore dans Résurrection (1899), où le héros en plein débat moral rencontre la figure du Christ.

À la fin de sa vie, il devient une sorte de maître à penser prônant une vie simple et morale et combattant les institutions oppressives et les formes de violence : il a eu de ce fait une grande influence sur des personnalités comme Mahatma Gandhi, Romain Rolland et bien d'autres.

Sommaire

Biographie

Léon Tolstoï
Portrait par Ilya Repine (1887).

Enfance

Né le 28 août 1828 du calendrier julien (9 septembre 1828 du calendrier grégorien) à Iasnaïa Poliana, Léon Tolstoï est le fils de la comtesse Marie Sergueievna Volkonsky, elle-même fille du feld-maréchal Nicolas Volkonsky, mariée à trente-deux ans au comte Nicolas Ilitch Tolstoï, un jeune homme désargenté, vétéran de la campagne de Russie. De cette union naquirent quatre fils, Serge, Nicolas, Dimitri, Léon et une fille, Marie[1]. Peu de temps après la naissance de Marie, alors que Léon n'avait que dix-huit mois, la jeune femme mourut d'une fièvre puerpérale.

Jusqu'à huit ans et demi, Léon ne connut que la campagne à Iasnaïa Poliana, la famille et les petits paysans. Il apprit l'arithmétique, ainsi que, partiellement, le français, l'allemand et le russe. Puis la ville attira la fratrie, pour qu'elle y reçoive une éducation de qualité. À cette époque, Léon fut surnommé Liova riova, ce qui signifie Léon le pleurnicheur, du fait de sa grande sensibilité, notamment lors de son départ de Iasnaïa Poliana avec sa famille pour Moscou. Pourtant, avant même d'avoir pu s'habituer à cette nouvelle vie, la famille dut affronter un nouveau malheur : le 21 juin 1837, le père meurt soudainement en pleine rue. L'année suivante, leur grand-mère connaît le même destin. Consécutivement au décès d'Alexandra Ilinitchna Osten-Sacken, une tante qui fut nommée tutrice, sa sœur Pélagie Ilinitchna Youchkov la remplaça dans ce rôle. Cette dernière habitant Kazan, au bord de la Volga, la famille Tolstoï s'y installa.

En 1844, Léon, âgé de seize ans, s'inscrit à la faculté des langues orientales dépendant de l'université de Kazan en pensant devenir diplomate. Très vite, les études l'ennuient, et après avoir ajourné ses examens, il se tourne vers la faculté de droit, où il n'obtient guère de succès. Il constata très tôt que l'enseignement reçu ne l'intéressait pas, seules ses lectures personnelles, nombreuses et variées (histoire, traités philosophiques), éveillaient en lui une curiosité insatisfaite.

Il tint rapidement un journal personnel, ainsi qu'un recueil de règles de conduite qu'il nourrissait quotidiennement et y faisait référence tout aussi fréquemment. Ses sentiments et ses frustrations l'emportèrent dans ce désir de perfection plus que de droiture. Sa beauté même venait à le chagriner, alors qu'il se désolait d'un physique ingrat. Il écrivit à ce propos :

« Je suis laid, gauche, malpropre et sans vernis mondain. Je suis irritable, désagréable pour les autres, prétentieux, intolérant et timide comme un enfant. Je suis ignorant. Ce que je sais, je l'ai appris par-ci, par-là, sans suite et encore si peu ! [...] Mais il y a une chose que j'aime plus que le bien : c'est la gloire. Je suis si ambitieux que s'il me fallait choisir entre la gloire et la vertu, je crois bien que je choisirais la première. »

— Journal, 7 juillet 1854

Cette ambition ne s'exprima pas immédiatement, et lorsqu'il quitta l'université en 1847, à dix-neuf ans, il pensait trouver sa raison d'être dans les travaux des champs et la bienfaisance : propriétaire terrien boyard, il raconte qu'il lui arrive de fouetter ses serfs, ce qu'il regrette[2]. Pourtant, il se détourna vite de ceux-ci, préférant une vie décousue de Toula à Moscou, rythmée par le jeu (de cartes surtout) et l'alcool[3].

L'écrivain soldat

Tolstoï en uniforme militaire, par le photographe Sergei Lvovich Levitsky (en), 1856

Ses liens avec son frère aîné Nicolas, qui avait intégré l'armée, l'emmenèrent au combat dans le Caucase, face aux montagnards dirigés par le chef rebelle Chamil. Il y vécut l'aventure et la gloire qu'espéraient tant de jeunes gens de son âge. Il relata plus tard son expérience dans Les Cosaques. Mais dans l'immédiat ses souvenirs d'enfance le préoccupaient davantage. Il en fit un récit, Enfance, qu'il envoya au directeur de la revue Le Contemporain, Nekrassov, qui lui répondit favorablement le 29 août 1852. Le roman connaît un franc succès[4]. Très vite, il entreprend la suite : Adolescence publiée en 1854, puis Jeunesse en 1855.

Le succès aurait pu le convaincre que son destin fût celui d'écrivain. Pourtant, cette idée lui paraît d'autant plus absurde que son attirance pour l'action l'empêche de se penser comme simple homme de plume[5]. La Russie venant de déclarer la guerre à la Turquie, Léon laissa ses amis cosaques et rejoint son régiment en Bessarabie. Il y fut dirigé en Crimée, où il connut le danger, qui l'exaltait et le scandalisait à la fois. La mort révoltait l'homme pressé. Cette impatience fut soulagée par la chute de Sébastopol, qui le dégoûta définitivement du métier militaire. Il en composa trois récits, Sébastopol en décembre 1854, Mai et août 1855, qui émurent l'impératrice, et furent traduits en français à la demande d'Alexandre II.

En novembre 1855, Léon Tolstoï fut envoyé comme courrier à Saint-Pétersbourg. Ivan Tourguéniev le reçut, l'hébergea, et Léon Tolstoï put fréquenter grâce à lui les cercles des écrivains cotés de l'époque, mais il s'en détourna rapidement, son humeur le rendant irritable à chaque échange. Il se retira à Iasnaïa Poliana pour vivre plus paisiblement, tout en formulant le souhait de fonder un foyer, qu'il percevait comme nécessaire à son équilibre physique et moral. La mort de son frère Dimitri, de tuberculose, l'en convainquit.

L'errance

Son profond désir de solitude, son horreur de la sexualité débridée et malgré tout sa ferme volonté de fonder un foyer, firent de Tolstoï un homme aux sentiments amoureux complexes, mêlant amour impossible à amour foudroyant. Amour impossible d'abord, puisque l'homme ne parvint pas aisément à trouver cette stabilité tant vénérée ; foudroyant ensuite lorsqu'il fut marié avec Sophie Behrs.

Il rencontra Ivan Tourguéniev à Paris, où il arriva en février 1857, qui lui fit connaître les arts et la culture française qui l'amusaient et l'agaçaient. Il décida de partir pour la Suisse, où il fit la connaissance de sa tante au second degré, Alexandrine Tolstoï, dont il admirait l'intelligence, avant de revenir en Russie puis de repartir, le 25 juin 1860, pour l'Allemagne, où il effectua des travaux d'inspection des écoles, des études de méthodes pédagogiques. Son frère Nicolas, souffrant de la tuberculose, mourut le 20 septembre de cette même année. Léon Tolstoï continua malgré tout ses investigations, parcourant l'Europe, de Marseille à Rome, de Paris à Londres, où il rendit visite à Alexandre Herzen, ainsi qu'à Bruxelles, où il rencontra Proudhon.

L'abolition du servage, ordonnée par Alexandre II le 19 février 1861, enchanta Tolstoï - tout en lui faisant craindre que cet événement ne débouchât sur une révolte populaire[6]. Il exerça alors la fonction d'arbitre de paix, chargé de régler les contentieux entre propriétaires fonciers et les serfs dans le district de Krapivna. L'oisiveté sentimentale de Léon fut abrégée par sa rencontre avec Sophie Behrs, fille d'André Estafiévitch Behrs, médecin attaché à l'administration du palais impérial de Moscou de lointaine ascendance allemande. Et Tolstoï d'écrire à propos de cet événement :

« Moi, vieil imbécile édenté, je suis tombé amoureux. »

— à sa tante, le 7 septembre 1862

Le mari, le père

Son mariage avec Sophie, de seize ans sa cadette, fut d'autant plus improbable que l'attachement que Léon vouait à la solitude, sa forte personnalité, et son passé tumultueux faisaient de cet engagement amoureux une folie. La veille du mariage, Léon fit lire à Sophie le Journal dans lequel il détaillait ses pires défauts. Cela ne découragea pas la jeune femme, et le 23 septembre 1862, les fiancés se marièrent à l'église de la Nativité de la Vierge.

Installé à Iasnaïa Poliana, le couple connut des jours heureux, quiétude que Léon assure n'avoir pas vécue jusqu'alors. Ce calme, bien qu'il ait souvent fait souffrir Sophie, citadine de cœur, a permis à Tolstoï d'atteindre la sérénité de l'écrivain. Il publia alors Les Cosaques (1863), puis commença d'écrire La Guerre et la Paix intitulé d'abord l'Année 1805. Après s'être rendu sur le champ de bataille de Borodino, et s'être documenté à Moscou, il revint à Iasnaïa Poliana pour continuer d'écrire, avec une rigueur étonnante. Reprenant plusieurs fois des passages entiers de la Guerre et la Paix, il parvint à achever d'écrire le sixième et dernier volume de l'ouvrage en 1869[7].

La même année, il vit naître son troisième fils, baptisé comme lui Léon. Cette période de jouissance contraste bientôt avec la tourmente que l'écrivain vit à la suite d'une prise de conscience soudaine et puissante, celle de n'être qu'un mortel. Ce bouleversement moral se produit alors que Tolstoï est en voyage vers Penza, lors d'un arrêt dans une auberge de la ville d'Arzamas [8]. Léon confia à ce sujet, dans son Journal :

« Brusquement, ma vie s'arrêta... Je n'avais plus de désirs. Je savais qu'il n'y avait rien à désirer. La vérité est que la vie est absurde. J'étais arrivé à l'abîme et je voyais que, devant moi, il n'y avait rien que la mort. Moi, homme bien portant et heureux, je sentais que je ne pouvais plus vivre »

— Journal, septembre 1869

C'est alors que Léon se plongea dans la lecture de philosophes, Schopenhauer en particulier, qu'il apprécia rapidement. Il fit, alors, de nombreux projets, entama la rédaction d'un syllabaire, rouvrit une école notamment. Cette effervescence cachait en réalité un profond vide causé par l'achèvement de son œuvre la Guerre et la Paix. Le talent de Tolstoï fut bientôt concentré sur un dessein, celui de rédiger un « roman sur la vie contemporaine et dont le sujet serait une femme infidèle ». Le projet de rédaction d'Anna Karénine naquit après que Léon eut parcouru les Récits de feu Ivan Pétrovitch Belkine de Pouchkine, en mars 1873, que son fils Serge lisait alors.

La rédaction d'Anna Karénine alla pourtant lentement, interrompue par de nombreux drames de famille. En novembre 1873 le dernier-né des Tolstoï, Pierre, mourut âgé de dix-huit mois, emporté par le croup (diphtérie). L'année suivante, Nicolas, le cinquième fils, ne vécut guère plus d'un an, hydrocéphale de naissance. Sophie, malade, fit une fausse couche peu de temps après, puis deux tantes (Toinette et Pélagie Youchkov) moururent. Cette accumulation de tragédies retarda la parution du roman mais ne l'empêcha pas, et l'entêtement de Léon eut raison de son scepticisme, voire de son dégoût pour l'œuvre qu'il venait de faire naître, qu'il jugea « exécrable ». La critique en fit autrement et l'accueillit favorablement. Comme après avoir achevé l'écriture du précédent roman, il connut une période trouble, où les considérations philosophiques qu'il avait mêlées aux évènements romanesques dans Anna Karénine avaient accouché d'une pensée éthico-religieuse.

La pensée de Tolstoï

Ses premières publications sont des récits autobiographiques (Enfance et Adolescence) (1852-1856). Ils rapportent comment un enfant, fils de riches propriétaires terriens, réalise lentement ce qui le sépare de ses camarades de jeu paysans. Plus tard, vers 1883, il rejette ces livres comme étant trop sentimentaux, une bonne partie de sa vie y étant révélée et décide de vivre comme un paysan en se débarrassant aussi de ses possessions matérielles héritées, qui étaient pourtant nombreuses, ayant acquis le titre de comte. Avec le temps, il sera de plus en plus guidé par une existence simple et spirituelle.

Il est frappé dès son enfance par le sentiment de l'absurdité de la vie (à la suite de la mort de son père) et il refuse l'hypocrisie des relations sociales. Le sentiment moral est ce qu'il y a de véritablement divin : toute la morale de Tolstoï est fondée sur ce sentiment. Par ailleurs, Tolstoï rejette l'État et l'Église. Si certains ont pu rapprocher la pensée de Tolstoï d'un nihilisme fondé sur une morale personnelle, d'autres ont fait de l'écrivain russe un penseur important et influent de l'anarchisme chrétien: en effet, sa critique radicale de l'État, ses préoccupations envers les masses opprimées, l'importance de ses réalisations pédagogiques, sa recherche de cohérence sur le plan personnel, en ont fait un penseur proche de l'anarchisme. Par ailleurs, il conçoit l'art véritable comme étranger à la recherche du plaisir purement esthétique : l'art est un moyen de communication des émotions et d'union entre les hommes. Aussi critique-t-il l'art pour l'art, la beauté bourgeoise inaccessible aux gens simples.

Marqué par des conflits comme la Guerre de Crimée (1853-1856) durant laquelle il a été mobilisé, relatée dans Récits de Sébastopol, ou les conflits passés telles les Guerres napoléoniennes, qui constituent la trame de son œuvre majeure: Guerre et Paix, Tolstoï entame à partir des années 1870 une sorte d'introspection, en forme de quête spirituelle. En 1879, Tolstoï se convertit au christianisme qu'il évoque dans Ma confession et Ma religion (ouvrage censuré au départ), mais il est très critique par rapport à l'Église orthodoxe russe : son christianisme reste empreint de rationalisme, la religion étant toujours chez lui un sujet de violents débats internes, ce qui l'amènera à concevoir un christianisme détaché du matérialisme et surtout non-violent. Sa critique des institutions oppressives et sources de violence inspirera le Mahatma Gandhi, ainsi que Romain Rolland. Leur message sera ensuite repris par Martin Luther King, Steve Biko, Aung San Suu Kyi, Nelson Mandela et bien d'autres. Gandhi lit Lettre à un Hindou de Tolstoï en 1908, où l'écrivain russe dénonce des actes de violence de nationalistes indiens en Afrique du Sud ; ceci amènera Gandhi et Tolstoï à correspondre jusqu'à la mort de Tolstoï. De même, Rolland publiera peu après le décès de Tolstoï sa biographie: Vie de Tolstoï.

De son côté, l'Église orthodoxe excommunie Tolstoï après la publication de son roman Résurrection.

À la fin de sa vie, Tolstoï part en vagabond, attrape froid et meurt d'une pneumonie dans la solitude, à la gare d'Astapovo, tout près de sa propriété d'Iasnaïa Poliana, mais incompris de sa famille, y compris de sa femme Sophie qu'il refusera de voir. Pourtant ils s'autorisaient chacun à lire le journal intime de l'autre et ont eu treize enfants ensemble (cinq meurent en bas âge), mais Sophie était aussi celle qui dirigeait le domaine, donc assez autoritaire. Wladimir Tchertkoff, officier de la Garde russe et grand admirateur de l'écrivain (devenu le chef du groupe des tolstoïens) exerce beaucoup d'influence sur la famille et convainc Tolstoï de casser son testament pour donner tous ses droits d'auteur au peuple russe souffrant.

Tolstoï fut aussi inspiré au cours de sa vie par d'autres figures majeures de la non-violence telles le philosophe américain Henry David Thoreau ou le prophète baha'i Baha'u'llah.

Tolstoï et l'espéranto

Espérantiste convaincu, Tolstoï a fait savoir qu'il était favorable à l'espéranto, langue internationale qu'il disait avoir apprise en deux heures.

« J'ai trouvé le volapük très compliqué et, au contraire, l'espéranto très simple. Ayant reçu, il y a six ans, une grammaire, un dictionnaire et des articles en espéranto, j'ai pu arriver facilement, au bout de deux petites heures, sinon à l'écrire, du moins à le lire couramment. [...] Les sacrifices que fera tout homme de notre monde européen, en consacrant quelque temps à son étude, sont tellement petits, et les résultats qui peuvent en découler tellement immenses, qu'on ne peut se refuser à faire cet essai. »

— 1894

Tolstoï et le végétarisme

Léon Tolstoï adopta un régime végétarien en 1885. Il préconisait le « pacifisme végétarien » et prônait le respect de la vie sous toutes ses formes même les plus insignifiantes. Il écrit qu'en tuant les animaux « l'homme réprime inutilement en lui-même la plus haute aptitude spirituelle - la sympathie et la pitié envers des créatures vivantes comme lui - et qu'en violant ainsi ses propres sentiments, il devient cruel »[9]. Il considérait par conséquent que la consommation de chair animale est « absolument immorale, puisqu'elle implique un acte contraire à la morale : la mise à mort »[10].

Tolstoï pédagogue

Article détaillé : Tolstoï pédagogue.

Tolstoï voulait libérer l’individu de l’esclavage physique mais aussi mental. En 1856, il donne ses terres aux serfs, mais ceux-ci refusent en pensant qu’il va les escroquer. Il se posera donc sans cesse cette question : « Pourquoi, mais pourquoi donc, ne veulent-ils pas la liberté ? ».

C’était un pédagogue hors du commun. Il voyage et dit que partout, on fait à l’école l’apprentissage de la servitude. Les élèves récitent bêtement les leçons sans les comprendre. Mettre les enfants directement en contact avec la culture, c’est renoncer à cette programmation fastidieuse et stérile qui va du plus simple au plus compliqué. Ce qui intéresse les enfants, ce sont les sujets vivants et compliqués, où tout s’enchevêtre. « Que faut-il enseigner aux enfants ? » Tolstoï imagine une prolifération de lieux culturels, où les enfants apprendraient en fréquentant ces lieux[11].

Tolstoï anarchiste mystique chrétien

Tolstoï s'est toujours réclamé de son héritage chrétien et a tardivement formalisé son anarchisme politique à travers l'expression d'une mystique de la liberté tout entière enracinée dans l'exemple christique. Le bien-fondé de l'autorité et de toute forme de pouvoir visant à la limitation de la liberté personnelle fut dénoncé par Tolstoï dans de nombreux articles à tonalité résolument anarchiste et motivés par une foi réfléchie dans l'injonction christique du service de l'autre. Le paradigme social dérivé de ladite règle d'or est célébré par Léon Tolstoï comme celui d'un monde voué à l'épanouissement de tous dans le respect réciproque et l'exaltation personnelle.

Ses écrits présentant quelques similitudes avec le bouddhisme influenceront les anarchistes mystiques russes du début du XXe siècle, parmi lesquels Georges Tchoulkov, Vassili Nalimov ou Alexis Solonovitch. La conjonction de ces deux dimensions, mystique et anarchiste, dans maints écrits de Tolstoï, feront forte impression sur le jeune Gandhi. Ce dernier entrera en contact avec Tolstoï, une correspondance s'ensuivra, et Gandhi se réclamera toute sa vie de la pensée de Tolstoï, dont il disait être un « disciple »[réf. souhaitée].

Œuvres

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Romans

Nouvelles

Léon Tolstoï à son bureau
Portrait de Leonid Osipovich Pasternak (1908).
Léon Tolstoï à son bureau
Photographié en mai 1908.
  • Récits de Sébastopol, aussi intitulés Récits du Caucase, (1855)
  • La Matinée d’un seigneur (1856)
  • Deux hussards (1856)
  • Lucerne (1857)
  • Albert (1857)
  • Trois Morts (1859)
  • Le Bonheur conjugal, aussi intitulé Katia, (1859)
  • Polikouchka (1863)
  • Le Cheval aussi intitulée Kholstomer (1885)
  • La Mort d'Ivan Ilitch (1886)
  • La Sonate à Kreutzer (1889)
  • Aliocha Gorchok
  • Le Réveillon du jeune tsar
  • Après le bal
  • Ainsi meurt l'amour
  • Les Mémoires d'un fou
  • Histoire d'Ivan le petit sot (conte philosophique)
  • Histoires pour les enfants
  • Mikhaïl, (1893)
  • Maître et serviteur (1895)
  • Une paysanne russe
  • Le Cadavre vivant, (1900)
  • Hadji-Mourat (1904)
  • Alexis le Pot (aussi intitulé Une âme simple) (1905)
  • Journal posthume du vieillard Fedor Kouzmitch (1905)
  • Ce que j'ai vu en rêve (1906)
  • Le Père Basile (1906)
  • Quels sont les assassins ? (1908)
  • Khodynka (1910) - Dernier écrit littéraire de Tolstoï, composé quelques mois avant sa mort.
  • Marchez pendant que vous avez de la lumière
  • Le Père Serge, publiée post-mortem (1911)
  • Le Diable, publiée post mortem (1911)
  • Le Faux Coupon, autre traduction Le Faux billet publiée post mortem (1911)

Théâtre

  • La Puissance des ténèbres (1887)
  • Les Fruits de la science (1890)

Autobiographie

  • Enfance (1852)
  • Adolescence (1854)
  • Jeunesse (1855)
  • Ma confession (1879-1882)

Essais

  • Ma religion (1885)
  • Physiologie de la guerre (1887)
  • Pouvoir et liberté (1888)
  • La liberté dans l’école (1888)
  • Quelle est ma vie ? (1888)
  • Ce qu’il faut faire (1888)
  • L’école de la Iasnaia Poliana (1888)
  • De la vie (1889)
  • L'argent et le travail (1890)
  • Critique de la théologie dogmatique (1891)
  • Le Royaume des cieux est en vous (1893)
  • Qu’est-ce que l’art (1898)
  • Les pensées des hommes sages pour tous les jours (1903)
  • Ravisez-vous ! Essai sur la guerre russo-japonaise (connu en français sous le titre de Ravisez-vous ! ou Ressaisissez-vous), 27 juin 1904, in Times ; en 1904 en russe aux éditions A. Tchertkoff

Œuvres inspirées de ses travaux

Notes et références

  1. Henri Troyat, Tolstoï, Paris, Hachette, collection Génies et Réalités, 1965, p. 8.
  2. Christiane Rancé, Tolstoï : le pas de l'ogre, éd du Seuil, 2010
  3. Troyat, p. 9.
  4. Troyat, p. 10.
  5. Troyat, pp. 10-11.
  6. Troyat, p. 12.
  7. Troyat, p. 16.
  8. Rupture morale constatée et étayée par David Patterson dans The Movement of Faith as Revealed in Tolstoi's "Confession", The Harvard Theological Review, Vol. 71, No. 3/4 (Jul. - Oct., 1978), pp. 227-243. À consulter en ligne (extrait)
  9. The morals of diet, or, the first step Léon Tolstoï, 1900 (ASIN: B0008CODQW)
  10. Writings on Civil Disobedience and Nonviolence, Léon Tolstoï, 1987 (ISBN 0865711097)
  11. DVD L'éducation en question, présenté par P. Meirieu : « Léon Tolstoï : Doit-on croire les enseignants sur parole ? »

Bibliographie

  • Christiane Rancé, Tolstoï, Le pas de l'ogre, Seuil, Paris, 2010.
    Vues sur l'auteur et son œuvre, éclairées par sa recherche de la vérité, religieuse et sociale.
  • Vladimir Pozner, Tolstoï est mort, 1935 ; réédité en 2010 aux éditions Christian Bourgois.
  • Henri Troyat, Tolstoï, Paris, Hachette, collection Génies et Réalités, 1965, 289 pages..
    Ouvrage insistant sur la personnalité de Tolstoï, mais jugé insuffisamment objectif par l'encyclopédie Britannica.
  • Maxime Gorki, Reminiscences of Leo Nicolaevich Tolstoy, Folcroft Library Editions, 1977, 86 pages. (ISBN 978-0841444553)
    Un portrait des plus fidèles, traduit en anglais.
  • Dominique Fernandez, Avec Tolstoï, Bernard Grasset, Paris, 2009, 330p. (ISBN 978-2-246-73950-0)
    Considérations diverses sur l'auteur et son œuvre.
  • Vladimir Fedorovski, Le Roman de Tolstoï, Éditions du Rocher, collection Le roman des lieux et destins magiques, 2010, 233 p. (ISBN 978-2-268-06914-2)
    Cette enquête, qui s’appuie sur des archives inédites, dépeint les passions et romances de Tolstoï, homme tiraillé entre l’amour et la spiritualité.
À propos de Léon Tolstoï
À propos de Sophie Tolstoï
  • Sophie Tolstoï, The Diaries of Sophia Tolstoy, traduits par Cathy Porter, 1987. (ISBN 978-0394528182)
  • Anne Edwards, Sonya: The Life of Countess Tolstoy, Simon & Schuster, 1981. (ISBN 978-0671240400)
Autres biographies
Films 

Voir aussi

En Russie, à Astapovo, la maison de Tolstoï conserve les souvenirs de l'écrivain; notamment son masque mortuaire (ancienne propriété de l'écrivain français Paul Bourget) et un moulage de sa main.

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Articles connexes

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